Extrait du chapitre V du Sûtra du Lotus « La parabole des herbes médicinales » (Le Sûtra du Lotus, Ed. Les Indes savantes, p. 109-111.)
Kashyapa, c’est comme les arbres et les plantes, les buissons et les bosquets ou les herbes médicinales dont il existe une variété infinie, chacune avec son nom et sa couleur, et qui poussent sur les collines, les vallées ou au bord des rivières, dans les différents sols du monde au milliard de plans. Des nuages noirs s’étendent brusquement, couvrant la totalité de ce monde et l’arrosant d’une pluie dense en un instant. L’humidité pénètre l’ensemble des plantes et des arbres, les buissons et les bosquets, mais aussi les herbes médicinales avec leurs petites racines, petites tiges, petites branches, petites feuilles ; leurs moyennes racines, moyennes tiges, moyennes branches, moyennes feuilles ; grosses racines, grosses tiges, grosses branches et grosses feuilles. Chaque arbre, grand ou petit, selon qu’il est d’une nature supérieure, moyenne ou inférieure, reçoit sa ration. La pluie qui tombe de la couverture de nuages s’accorde avec la nature de chaque espèce spécifique, la faisant croître et venir à maturation, fleurir et fructifier. Même lorsque toutes ces plantes et ces arbres poussent dans la même terre et sont arrosés par la même pluie, ils ont chacun leurs différences et leurs particularités.
Kashyapa, tu dois bien comprendre que l’Ainsi-venu n’est pas autrement. Il apparaît dans le monde comme un grand nuage qui s’élève. Sa voix puissante porte et atteint tous les êtres célestes et humains, ainsi que les asura du monde entier, comme un grand nuage qui couvrirait les terres au milliard de plans. Au cœur de cette grande assemblée, il déclare : “Je suis l’Ainsi-venu, digne d’offrandes, au savoir correct et universel, à la conduite et à la clairvoyance parfaites, avancé dans la voie, comprenant le monde, aux mérites inégalés, instructeur des gens, maître des êtres célestes et humains, Bouddha, Honoré du monde. Ceux qui n’ont pas encore atteint l’autre rive, je les ferai traverser, ceux qui ne sont pas encore libérés, je les libérerai, ceux qui n’ont pas encore trouvé le repos, je le leur ferai trouver, ceux qui n’ont pas encore atteint le nirvana, je leur ferai atteindre le nirvana. De l’existence présente et des existences prochaines, je comprends les véritables circonstances. Je suis celui qui sait toutes choses, voit toutes choses, comprend la voie, ouvre la voie et enseigne la voie. Vous les êtres célestes et humains, asura et autres, devez tous venir ici, que je vous donne à entendre le Dharma !”
Alors les êtres vivants, d’innombrables milliers, dizaines de milliers et millions d’espèces se rendent à l’endroit où se trouve le Bouddha pour écouter le Dharma.
L’Ainsi-venu vérifie alors si les capacités de ces êtres vivants sont vives ou éteintes, s’ils sont diligents et assidus ou enclins à la paresse. Selon ce que chacun est capable d’assimiler, il leur enseigne alors la Loi d’une infinité de manières, afin de les ravir tous et qu’ils en retirent tous d’immenses bienfaits.
Quand ces êtres vivants ont entendu la Loi, ils jouissent de paix et de sécurité dans leur existence présente et de bonnes circonstances pour leurs existences futures, durant lesquelles ils connaîtront le bonheur grâce à la Voie et où il leur sera donné d’entendre à nouveau la Loi. Comme ils auront entendu la Loi, ils échapperont aux pièges et déjoueront les revers et les obstacles. En ce qui concerne les diverses doctrines, ils auront la faculté de faire usage de tous leurs pouvoirs, jusqu’aux plus étendus afin d’accéder ainsi progressivement à la Voie. C’est comme la pluie tombant de ce grand nuage sur toutes les plantes et tous les arbres, buissons, bosquets et herbes médicinales. Chacun, selon son espèce et sa nature, recevra toute la part d’humidité qui lui est nécessaire et pourra ainsi croître et fructifier.
La Loi qu’enseigne l’Ainsi-venu est d’aspect unique, de saveur unique, c’est-à dire l’aspect d’émancipation, l’aspect de séparation, l’aspect d’extinction qui finit par se fondre en une sagesse qui embrasse toutes les espèces. Lorsque les êtres vivants entendent la Loi de l’Ainsi-venu, même s’ils y adhèrent, la lisent, la récitent et la pratiquent comme cela leur a été prescrit, ils ne réalisent ni ne comprennent eux-mêmes les bienfaits qu’ils en retirent. Pourquoi cela ? Parce que seul l’Ainsi-venu comprend l’espèce, l’aspect, la substance, la nature de ces êtres vivants. Il sait sur quoi ils s’appuient, à quoi ils réfléchissent et quelles pratiques sont les leurs. Il sait comment ils s’appuient sur ces éléments, comment ils y réfléchissent et comment ils pratiquent. Il sait sur quelle Loi ils s’appuient, à quelle Loi ils réfléchissent, quelle Loi ils pratiquent et par quelle Loi ils arrivent à quelle Loi.
Les êtres vivants existent dans toutes sortes d’environnements, mais seul l’Ainsi-venu voit les véritables circonstances et les comprend entièrement et sans difficulté. Cela est tout à fait comme ces plantes et ces arbres, buissons, bosquets et herbes médicinales qui ne savent pas eux-mêmes s’ils sont de nature supérieure, moyenne ou inférieure.
Toutefois l’Ainsi-venu sait que celle-ci est la Loi d’aspect unique, de saveur unique, c’est-à-dire l’aspect d’émancipation, l’aspect de séparation, l’aspect d’extinction, l’aspect de nirvana ultime, de quiétude constante et d’extinction, qui finalement parvient à sa destination, la vacuité. Le Bouddha comprend tout cela. Toutefois, comme il a la capacité de percevoir les désirs qui habitent l’esprit des êtres vivants, il les guide et les protège, et c’est la raison pour laquelle il ne leur enseigne pas immédiatement la sagesse qui embrasse toutes les espèces.
Toi-même et les autres, Kashyapa, vous avez accompli une chose très rare, car vous comprenez comment l’Ainsi-venu enseigne la Loi en conformité avec ce qui est adéquat, vous pouvez y croire et vous pouvez l’accepter. Pourquoi dis-je cela ? Parce que le fait que les bouddhas, les Honorés du monde, enseignent la Loi en conformité avec ce qui est adéquat est difficile à appréhender, difficile à comprendre. »
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